Projet architecturale - ancrage sur le territoire - urbanisme

 

“Archist 2020”

DU VIDE A LA MEMOIRE
Considérons l’entrepôt qui accueillera le projet comme un paysage.


Un paysage qui n’est pas uniquement caractérisé par son enveloppe extérieure (celle que l’on perçoit depuis la ville) mais par un ensemble d’éléments assemblées, juxtaposées, liaisonnées lui conférant son identité et sa mesure et que nous ne pouvons nier si nous avons à y intervenir. Un paysage qui n’est pas figé mais qui est en perpétuel mouvement, le renvoyant tant à sa mémoire qu’à son dessein et donc nous amène à considérer le projet non pas comme une image figée mais comme un processus en mouvement.
L’architecture de l’entrepôt se caractérise d’abord par son vide. C’est-à-dire le volume qui lui a permis, dès sa conception, de disposer de proportions et de dimensions lui permettant de répondre à son premier usage : Entreposer. C’est un vide majestueux que seules les architectures cultuelles ou industrielles nous offrent réellement. Cet espace nous parle de la mémoire industrielle de la ville et de ce quartier à quelques encablures des darses portuaires et des infrastructures ferroviaires qui irriguent
le territoire nationale. Une architecture statique au service d’un transit commercial et international. Un vide qui nous parle de la mémoire des hommes et des femmes et d’un rythme de vie dont le quartier porte encore la mémoire.
Un vide qui nous parle de la pérennité de la pierre de façade en moellons de roche calcaires provenant du massif de la Nerthe et d’une époque où les carrières à ciels ouverts d’argile et de calcaire formaient des trous béants dans un sol qui impacteront l’extension de l’agglomération
Marseillaise et de ses 15em et 16em arrondissements. De l’extraction de ces ressources disponibles pour bâtir la ville et dont la constitution de son sous-sol définit sa propre matérialité.
Un vide aujourd’hui inoccupé et qui nous parle d’une période de transition durant laquelle incertitudes, inquiétudes, promesses et espoirs s’expriment.

LA STRUCTURE DU VIDE
Ce vide dont on parle, celui de l’entrepôt, est celui qui accueillera le projet. Ce grand volume est permis grâce à sa structure. Des travées de poteaux et de poutres en béton dont le franchissement des grandes portées est assuré par des fermes elles aussi en béton.
Ces éléments structurels linéaires existant constituent la trame et la mesure de base du projet. Une hauteur sous faîtage de 12 mètres, une hauteur sous chenaux de 8 mètres, 3 travées de 12,5 mètres de largeur et 24 mètres de profondeur, 1 travée de 20 mètres de largeur et 10 mètres de profondeur.
La distance entre les files porteuses est de 4,8 mètres.
Ces assemblages d’éléments porteurs linéaires et ces dimensions qui offrent un maximum de place au volume du vide et une liberté d’aménagements pour le projet.

Les architectes proposent une expérimentation des rencontres entre la structure qui apporte la stabilité avec les différents usages du lieu qui sont sources de mouvement. Cette expérimentation sort ici de scénarii classiques des relations entre des architectes maîtres d’œuvre et les usagers.
Le projet consiste en la mise en œuvre d’une structure béton poteaux poutres organisé selon une trame carré de 4 X 4 mètres sur trois dimensions. Une structure qui est une subdivision de la structure existante et donc du vide initial et qui rentre donc en résonance avec les proportions du lieu. Une résonance qui portera l’identité du lieu à venir et celle de sa mémoire.
L’élément de base permettant toutes sortes de combinaisons des plus simples au plus complexe. A la manière des structures de Sol Lewitt où l’élément de base (le cube) permet des combinaisons multiples : progression, permutation ou inversion lui permettant de s’approprier les notions de logique rationnelle.
Une structure comme préalable architectural, une structure comme support à une appropriation artistique.
Ce réseau de poutres et poteaux dessinant des sous espaces « approbiables », et qui présentent le plus de développement potentiel grâce à des dimensions permettant d’y ajouter des parois et des planchers au gré des besoins avec des portées limitées à 4 mètres. Il s’agit de montrer l’attention portée au Permanent – ce qui restera du bâtiment lorsque sa fonction initiale aura changé.
Une architecture qui s'articule autour de cette relation dialectique entre le permanent et le passager, ce qui reste à faire, de sorte que toute architecture doit, comme l’observe Lina Bo Bardi, nourrir les libertés «joyeuses» quotidiennes de ses occupants.
Saisir une opportunité. L’opportunité d’exposer de l’architecture pour un centre d’art. Des lieux qui nous incitent, à questionner certains processus. Montrer au travers d’une discipline rigoureuse, technique et quotidienne, d’autres façons d’entrer dans le projet, laissant à l’observateur aguerri ou profane, la possibilité d’y lire d'autres possibles, afin que chacun puisse trouver ce qui le stimule, l’implique, le nourrit et lui donne l’envie de vivre autrement. Émancipation à l’égard de la connaissance commune de ce qu’était l’architecture avant d’entrer.
Un réseau de poutres et poteaux créant des structures dans la structure, des espaces dans l’espace.
Un réseau qui se définit moins par sa trame régulière et sa simplicité géométrique que dans sa capacité à être explorée par les usagers pour l’investir selon l’évolution des besoins plastiques ou programmatique que nécessite un tel lieu d’expérimentation dans un quartier et un monde en transition.

Inscrire le projet de Jeanne Baret dans l’histoire d’un édifice et la mémoire d’un site.